Article sur Dragonium dans le Courrier de l'OuestArticle du Courrier de l'Ouest du 18 juillet 2019JOUER AVEC OU SANS SES YEUXLes déficients visuels, privés de jeux vidéo ? Plus maintenant. Dragonium se veut un jeu de rôle en ligne 100 % accessible aux non-voyants. Et ça s'est passé au Flip. PHOTO : La carte du jeu Dragonium en braille, que l'association Zyzomis envoie gratuitement aux joueurs qui la demandent. Mathieu PAPION - redacparthenay/a/courrierouest.com Sur Dragonium, on ne sait pas qui voit ou pas, et on s'en fiche ». Ludovic Ressegand-Valade, créateur du jeu, affirme que celui-ci est aujourd'hui 100 % accessible aux personnes non-voyantes. Pour jouer, elles se connectent sur le même site web que les autres, puis un système de synthèse vocale leur permet d'avoir accès aux informations de l'écran. Et surtout, l'association Zyzomis leur envoie gratuitement une carte du jeu en braille, afin qu'elles puissent se repérer dans l'espace, comme le font les joueurs voyants. Pourtant, Dragonium n'a pas du tout été conçu pour être accessible. Au départ, Ludovic Ressegand-Valade, passionné de programmation depuis longtemps, voulait lancer un jeu de rôle en ligne, en deux dimensions. L'idée était de recréer l'ambiance et le graphisme des jeux d'il y a une vingtaine d'années. Du rétro gaming somme toute assez classique. Il se met au travail en 2010, travaille à environ 80 % du code et en septembre 2012, Dragonium apparaît. Il se joue directement en ligne sur navigateur et voit s'opposer deux camps. Un jour, Ludovic Ressegand-Valade se rend au Futuroscope et participe à l'attraction « Les Yeux grands fermés ». Le principe : entrer dans une pièce plongée dans le noir complet et se laisser guider par des personnes aveugles. « J'ai discuté avec mon accompagnateur, et je lui ai demandé comment les aveugles font pour aller sur internet ». En entendant parler du système de synthèse vocale mis au point pour permettre aux mal-voyants de surfer sur la toile, il a voulu essayer de rendre le jeu accessible. « Si j'étais aveugle un jour, commentje ferais ? Parfois, je me dis que c'était une démarche très égoïste de ma part. » Il a alors mis au point le système de synthèse vocale et de carte du terrain de jeu en braille... Avant de se rendre compte que le jeu n'était encore accessible qu'à 25 %. En effet, difficile pour lui de se rendre compte de ce que les non-voyants parvenaient réellement à percevoir ou pas comme informations. C'est grâce aux retours de la communauté qu'il a pu rendre Dragonium accessible à 100 %. Une opération qui a eu un coût important. L'imprimante braille lui a coûté environ 3700 . Et il faut compter environ 5 pour l'impression d'une carte. Ludovic Ressegand-Valade compte principalement sur un système de dons et rappelle le caractère non-lucratif du jeu. En plus, il reçoit des sponsors de la Fondation de France. Aujourd'hui, Ludovic Ressegand-Valade estime qu'environ un tiers des joueurs de Dragonium seraient mal-voyants. Une estimation qui se fonde sur les joueurs qui lui envoient des messages en se disant déficients visuels, car le jeu ne demande à aucun moment à ses adhérents s'ils voient ou non. Et Dragonium permet aussi des rencontres réelles. Chaque année, en été, une rencontre entre joueurs est organisée dans la Vienne. L'occasion d'un échange qui ne tient pas compte des handicaps des uns et des autres, à l'image du jeu. Une initiative dont Ludovic Ressegand-Valade est fier : « Souvent, les personnes non-voyantes se retrouvent isolées face au reste de la société ». Le jeu, source d'inclusion. ENCADRÉ :
« Qui veut se faire crever les yeux ? » |